vendredi 12 novembre 2021

BioRadioSpective - Introduction et Episode 1

 

De tous les groupes que j’ai aimés quand j’étais ado, il en est un qui a un statut unique : je n’ai jamais vraiment réussi à en faire mon deuil.

Malgré un sursaut en 2007 j’ai fini par comprendre que les nouveaux Smashing Pumpkins ne seraient jamais à la hauteur des originaux. Je me suis purement et simplement fâché avec Muse (en 2009) et Placebo (dès 2006). Oasis n’existe plus. Si l’on creuse vraiment les anfractuosités de ma jeunesse… Nada Surf est anecdotique aujourd’hui. Slipknot, Korn, ne sont que de pales copies de leur folles origines, mais je ne leur souhaite aucun mal.

Mais Radiohead… Il y a une coïncidence qui restera pour toujours : en 2000 j’ai eu 15 ans un mois (à peu près) après la sortie de Kid A. Et à mon anniversaire on m’a offert OK Computer. Que j’avais déjà en cassette mais ça on y reviendra. Mais c’est comme si ce groupe avait toujours été là, présence discrète pour ne pas dire fantomatique, mais présence quand même. 20 ans. Vingt et un, même. Mon goût pour Radiohead peut aller au bistro aux Etats-Unis.

En 2003 j’achetais Hail to the Thief le jour même de sa sortie et l’écoutai religieusement, collé à la mini-chaîne, dès mon retour. Aujourd’hui, je crois ne toujours pas avoir réussi à finir une écoute entière de  A moon shaped pool … et pourtant je continuerai probablement longtemps à lister le groupe parmi mes préférés, quand bien même il n’a pas sorti un album me convaincant ces dix dernières années (en même temps ils en ont sorti qu’un). Que s’est-il passé ? Chaque fois que je pense au groupe c’est avec une tendresse infinie, et pourtant, on ne se cause plus.

Aujourd’hui, il est temps de revenir sur une relation certes houleuse, mais riche en émotions, et, qui sait ? de peut-être en tirer quelques enseignements.

  

1. Pablo Honey (Février 1993)

 

 

Quand je pense qu'il est des gens qui se moquent de la coupe de cheveux actuelle de Thom Yorke

Soyons honnêtes: il est peut-être là, en fait, l’album le plus clivant du groupe. Il y a généralement deux opinions qui s’opposent sur cet album. D’un côté les esthètes, cette bande de snobs, qui ne le considèrent digne d’aucun intérêt (ils ont déjà du mal à en trouver à The Bends). De l’autre les honnêtes gens, qui le voient comme un album de britpop honnête mais -évidement- encore loin des sommets à venir, voire peu marquant au milieu des albums de britpop qui pouvaient sortir à l’époque.

Et puis il y a moi. Même si vous avez déjà deviné où je me situe dans cette grille d’analyse, la vérité est que je ne saurais analyser cet album. Pour une raison très simple : cet album m’a (presque) tout appris. Lors de l’années scolaire 1999-2000 je faisais seulement mes premiers pas dans le grand défrichement de Rock des origines à nos jours, et je n’avais eu que quelques disques sous les oreilles quand celui-ci (enfin, non, quand le nom Radiohead) a croisé ma route. On m’avait copié sur cassette OK Computer et « celui où y a Creep ». Et au risque de déplaire à ma fanbase de bon gout, ce n’est pas le chef d’œuvre de 1997 qui a le plus retenu mon oreille à l’époque.

Je vais dire quelque chose qui semblera une évidence à toute personne de bon sens, mais qu’il me semble utile de poser ici : les clichés sont des clichés pour une bonne raison, à savoir qu’ils fonctionnent. Mais il est un autre point sur lequel je voudrais insister : un cliché n’en est pas un quand c’est la première fois qu’on y est confronté. Et c’est aussi cela qui me rend cet album si attachant. Creep est une bonne chanson, c’est un fait (si, si). Mais quand c’est la première chanson qu’on découvre avec ce passage d’un son clair pour le couplet à des torrents de distorsion pour le refrain… c’est transcendant. Je vieillis et donc les choses sont un peu floues, mais Pablo Honey est, j’en suis à peu près sûr, un des cinq premiers albums de rock à être entrés dans ma vie. Donc, plus encore que les « Ouah, on peut faire ça » que les grands (Beatles, Bowie, etc.) m’ont fait découvrir plus tard, Pablo Honey m’a permis de découvrir que ce qu’on y trouve existe en ce monde.

 


Et dans mes virginales oreilles, les envolées de Stop Whispering, l’alternance de structure couplets durs et lents / refrain pop plus rapide (très pixienne maintenant que je le sais mais je savais pas encore qui étaient les Pixies - j’avais même pas encore vu Fight Club) de Anyone can play guitar, le redémarrage et ce solo à la fin de I can’t - entendu depuis mille fois depuis dans des trucs faits avant, même l’ouverture claire de You avant de sortir du gros son, tout a laissé une trace.

Ici est née une sensibilité, une affinité même pour quelque chose que je ne connaissais pas, ou pas bien. Le rock devait être dur et colérique, voire rebelle (à qui, à quoi ? à 15 ans on ne s’embarrasse pas de la transitivité…) et idéalement que mes parents me demandent de baisser le son, mais je le découvrais ici émotif et émouvant, délicat… Je découvrais ma propre propension à la pop. Et mes parents me demandaient quand même de baisser le son ce qui ne gâchait rien.

 

Bon, il ne s’agit pas non plus d’absoudre l’album de ses défauts (qui n’en sont pas forcément) : sans la voix de Thom Yorke, Thinking about you est un morceau d’un affolante banalité. C’est aussi un album de Radiohead typique des premiers temps : à savoir un vinyle qui s’ignore. Je théoriserai sans doute plus longtemps sur les formes des albums de Radiohead un peu plus tard cependant : les trois premiers ont tous cette tendance à avoir une Face A moins cohérente que la B, mais aussi meilleure parce que contenant les meilleurs titres. Mais ici, avec le temps, je préfère de plus en plus la face B : Ripcord, Prove Yourself, ça reste bon, mais l’ensemble se mélange plus aisément en un fond homogène, surtout que d’un coup la constante de cette face c’est la batterie, qui claque vraiment bien sur cette album (probablement parce que, j’ai l’impression, Phil Selway y est incapable de taper sa caisse claire sans taper de cymbale en même temps). Sans compter une vibe « Scared to get happy », très indie pop anglaise 80’s, mais avec une volonté d’aller de l’avant, presque une joie de vivre, qui fait chaud au cœur.

 

S’il est probable que j’aie écouté cet album plus de fois dans les dernières semaines juste pour écrire ces lignes que je ne l’ai fait ces 10 dernières années, cela ne change rien : tout familier qu’il soit (chaque pont, chaque riff, chaque changement de rythme est gravé dans ma mémoire), ce qui me rend fatalement tendre à son égard, il reste un bon album qu’on considèrerait un pépite oubliée si ses auteurs n’avaient pas tout explosé derrière, et dont le principal défaut, peut-être, est de compiler les meilleurs titres écrits par un groupe qui existait déjà depuis 7 ans à la sortie de celui-ci, et qui a donc pioché dans bien des influences en chemin.

 

Plus mauvais titre: Thinking about you

Meilleur titre pas sorti en single : Ca se joue entre Ripcord et I can’t… Mais au final je dirais I can’t parce que je suis une petite chose sensible... et que j’aime bien les lignes de basse menaçantes avant que le groupe revienne

Meilleure face B de single de la période : Difficile de dire autre chose que « Inside my head ». C’est l’équivalent de découvrir les titres des années 80 de R.E.M. quand on ne connaît que leurs morceaux RTL2.

Leçon de vie cachée dans les paroles: Stop Whispering / Start shoooooooouuuuuoooouuting

 

 

3 commentaires:

  1. Yeah, ravi de te voir revenir aux affaires, surtout avec cette retrospective d'un groupe qui m'est aussi très cher (et qui m'accompagne d'autant plus que, de mon coté, A Moon Shaped Pool a carrément ravivé la flamme, j'ai adoré cet album).

    en ce qui concerne Pablo Honey, c'est un bon disque, qui effectivement contient assez peu de titres faibles. Mais je l'ai beaucoup moins fait tourner que toi, car à l'époque j'avais acheté un curieux double disque avec Pablo Honey et the Bends, inutile de dire que j'ai plutôt usé the Bends jusqu'à la corde.

    ce qui est amusant, c'est qu'une fois de plus on est pas trop raccord sur les titres. Si je classe "Thinking about You" parmi les chansons que j'aime le moins, la deuxième serait certainement "i Can't". Du coté de mes préférées, tu ne les as pas citées il s'agit de "Vegetable" et "Lurgee". "Blow Out" est super intéressante aussi, mais elle colle pas trop à l'esprit du disque je trouve.

    du coté des B-Sides, "Inside My Head" bien sur, mais j'aime aussi beaucoup "Banana Co."

    hate de lire la suite !

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    1. Comme je le disais j'aime beaucoup la face B, mais j'ai beaucoup de difficulté à en distinguer les différents titres (mais, de toutes façons, c'est un problème avec tous les albums de Radiohead jusqu'à OK Computer j'ai envie de dire, tout dépend juste de oui tu mets la séparation entre les deux faces)
      Blow Out est trés bien et sa bizarrerie montre en fait déjà cette sorte d'obsession du dernier titre d'album qu'on retoruve chez Radiohead. La façon dont ils te laissent quitter l'écoute leur tient très à coeur, sur tous les albums.

      Je réalise qu'il y a aussi Pop is dead (qui est pas une face B mais un single hors album parce que oui à l'époque ça se faisait encore - comme blur a popscene) qui est un super titre.

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  2. "I'm not a Vegetable, I will not control myself !!!"
    de bonnes paroles d'ado ca aussi...

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