Hail to the thief (Juin 2003)
2003, l’été entre mes deux années de prépa. L’année scolaire touche à sa fin quand je me rends chez Gibert joseph musique, le mardi midi (c’est à deux pas de ma prépa), pour acheter le nouvel album du groupe. Je suis super hypé parce que le single qui tourne en radio, There there, a des guitares. Une rythmique tribale, un pont de fous, et même – j’ose à peine le dire – un solo de guitare.
We’re just accidents waiting,
waiting to haaaaa-aaaa-aaapen…
Face aux piles de disques je me retrouve face à un choix : Edition normale ou édition limitée ? Le choix est vite résolu, la limitée est pas beaucoup plus chère. A ce moment je n’ai pas conscience que ce disque sera tel une épine dépassant de ma bibliothèque pour les années à venir. Mais j’ai eu raison parce que c’étati une vraie édition limitée pas comme toutes ces éditions limitées digipack carton ou il es tplsu difficile de mettre la main sur la pas limitée qu’autre chose (oui, Muse, c’est de vous que je parle – comment vous avez pu sortir un live où vos meilleurs morceaux apparaissent pas, en plus ?)
Le disque reste au chaud dans mon sac tout cet après-midi de cours et le
soir venu je le mets dans la mini-chiane (il ignore encore combien de temps il
passera dedans – on y reviendra), livret dans les mains pour suivre les paroles
(ce qui n’est pas forcément facile avec cette édition oblongue). J’aurais à
peine attaqué « We suck young blood » (qui sonne bizarre quand même)
quand ma mère m’appelle à table. Elle est quand même drôlement bien « 2+2=5 »,
ce petit côté énervé à la My Iron Lung, ça fait plaisir. Bon, il est temps de
finir cette écoute. Il est bien cet album. Je vais le mettre comme musique de
réveil demain, et faudra que je pense à le copier sur une cassette pour pouvoir
l’écouter en route vers le lycée (oui la prépa c’est quand même un lycée l’endroit
où on la fait).
2009. Je bosse maintenant. Et j’habite plus chez mes parents. J’ai racheté Hail
to the Thief (en edition normale du coup) parce que autant j’ai encore la
pochette, autant je ne parviens pas à retrouver le CD. C’est quand même con, c’est
un des mes albums préférés du groupe. On est samedi après-midi et je dois
passer chez mes parents pour les aider. Comme ils vont refaire ma chambre ils
veulent que je les aide à descendre ma mini-chaîne désormais décédée aux
encombrants. C’est quand même dommage. OK, j’en ai racheté une, plus petite,
plus discrète, tout aussi efficace du point de vue sonore, mais ils ne font
plus de machines telles que ma bonne vieille chaine, sa double platine
cassette, son chargeur 3 CDs…. Qui s’ouvre tout seul alors que je charge la
chaine dans mes bras. Me laisant entrevoir, bien planqué qu fond, en position
de lecture, mon exemplaire « limité » de HTTT. Je le reconnais pour
une raison très simple (que les gens qui n’ont pas eu à, comme moi, acheter ce
disque deux fois ignorent) : le CD (le disque lui-même) de l’édition
limitée est crème alors que celui de l’édition normale est noir. Je triture, je
secoue, je récupère mon disque, le colle dans une autre pochette vite fait pour
pouvoir le ramener chez moi sain et sauf et le replacer dans son étui de carton.
Vous l’aurez compris, j’aime cet album (et les mini-chaînes à chargeur 3
CD). J’irais même jusqu’à dire que s’il y a un album de Radiohead que je
considère comme un « Disque à moi (et rien qu’à moi) » ce serait
celui-ci, la question se pose à peine. (Je crois que c'est le seul T-shirt à l'éffigie d'un album que je possède - Letters to Cleo ne compte pas, je le considère comme un hommage à PArks & Recreation)
C’est aussi le moment de sa carrière où le groupe a attiré la plus grande
sympathie de ma part. Probablement grâce au live au Réservoir dans le cadre d’une
des dernières de l’émission Music planet 2Nite (diffusé en Novembre 2003). Le
groupe y apparait décontracté, et bien moins militant qu’on n’essayait de nous
le vendre – je suis presqu’encore capable, aujourd’hui, de citer des bouts des
interviews qui sont faites du groupe.
Hail to the thief est aussi l’anti Kid A dans sa création. 14 titres enregistrés en 14 jours, à Los Angeles. D’où ce côté plus brut, y compris sur les morceaux les plus « produits ». Mais c’est surtout l’album sur lequel mon goût est le plus « transpartisan » . Comprendre : les titres que j’aime tombent autant dans la catégorie électro que dans la catégorie Rock. Mais comprendre aussi que sur cet album la frontière entre les deux commence à sérieusement s’amenuiser : les chansons y sont des chansons, et peu importe avec quoi on les joue. Et beaucoup d’entre elles font partie de mes préférées. Tout n’est cependant pas parfait sur cet album: il contient tout à la fois le titre du groupe que j’aime le moins de l’intégralité de leurs albums (si, si), et l’attention portée aux titres rock dans les sorties de singles me dépasse (en particulier Go to sleep qui n’est pas une mauvaise chanson mais franchement, elle casse pas 3 pattes à un canard. Par exemple c’est seulement en la réécoutant pour écrire cet article que j’ai réalisé qu’en fait elle a pas de refrain. ) (Ah mais non en fait The Gloaming est techniquement sorti en Single. Quelle idée)
Mais à l’inverse, je crois que peu d’album du groupe contiennent autant de
pépites cachées (certes, le fait de sortir la moitié des albums en singles dans
les années 90 limitait la capacité à cacher des pépites, ça joue aussi). Mais
il est clair que des Where I end and you begin (parfait morceau pile sur la
frontière évoquée plus tôt), Mais aussi toute la fin d’album (y a pas de scandale
de la face B sur cet album-ci, voire je préfère tout ce qu’il y a à partir de
There There, presque – en fait il y a un ventre un peu mou de deux titres (We
suck young blood / The Gloaming – mais le reste est du très bon, voire de l’exceptionnel - et parfois de l'unique. Jamais plus le groupe ne ressortira des morceaux qui sonnent comme A wolf at the door ou Backdrifts).
A terme… j’ai toujours l’impression que Hail to the Thief est une album que les gens trouvent bon, mais qu’il n’a jamais déclenché les passions que les précédents (et certains suivants) ont pu déclencher. Et tout à la fois je le comprends, et je le déplore . Moi-même j’arrive presque à terme de ce que j’ai à dire dessus (même si ça vous fera du repos après la plâtrée de la dernière fois). Si : le concert du groupe aux Eurockéennes 2003, diffusé quelques temps plus tard (sur Arte probablement) est probablement un des concerts auxquels je regrette le plus de ne pas avoir été tant la setlist est une quasi-perfection vu le répertoire du groupe à l’époque. Manquent peut-être juste un petit Mixomatosis et The Bends.
Au final, c’est juste un très très bon album de Radiohead… et est-ce
là leur premier faux pas ? Est-ce là que les génies cessent de tout
révolutionner et qu’on va bientôt les renier ? Est-ce là que la
critique prend le dessus sur l’appréciation ? Pas avec moi en tout cas, ou
pas encore. Ce disque, c’est mon chez moi. Plus encore que n’importe lequel des
autres albums, celui-ci me réconforte (en dépit de ce dont il parle). Je le
mets, et je suis soudain plus jeune, de retour dans ma chambre, chez mes
parents, le coucher de soleil estival se reflète dans les vitres des trains
passant à une centaine de mètres dehors et inonde ma chambre de reflets orangés.
La vie est simple. Tout va bien. Don’t. know. Why. I feel. So. Skinned. A-live.
Plus mauvais titre: The Gloaming, que je n’aime toujours pas, et dont
je suspecte qu’il est encore si souvent joué en concert parce qu’il permet à
Thom Yorke d’aller pisser
Meilleur titre pas sorti en single : C’est une égalité (je ne peux pas faire autrement,
les deux sont quasi-indissociables pour moi) entre « A Punch up at a
wedding » et « Mixomatosis ».
Meilleure face B de single de la période : Fog (Again) (Live). JE reste
convaincu que c’es tla version du live au Réservoir, c’est un splendide piano
voix extrêmement simple, et pour moi cette version est la meilleure des 3 officiellement
publiées (respectivement Fog, Fog (Again) (Live) et Fog (Again) (Again) sur la
récente réédition Kid Amnesia