J’avis beau
savoir que ça allait me forcer à recommencer à écrire, je ne savais pas encore
comment. J’ai naïvement cru que j’allais pouvoir reprendre à l’ancienne et à la
rigueur peut-être faire allusion à ma situation courante.
Sauf que non, je
suis vraiment con, et quand tu as un truc qui occupe le plein centre de tes
pensées, c’est pas forcément le truc ni le plus malin ni le plus simple que de
chercher à en causer seulement par petites touches.
Si vous êtes ici
c’est parce que vous êtes un ami de la famille et que je vous ait envoyé ce
lien directement, donc nous sommes entre gens de bien et autant que j’arrête de
faire du suspense : le 13 Juillet dernier on m’a diagnostiqué un lymphome. Je
suis donc en arrêt de travail depuis. Je subis des examens destinés à
déterminer à quel type on a affaire afin de pouvoir déterminer au mieux le
traitement à me faire suivre. Ce type de maladie, même s’il y en a plein de
types, est connue et a tendance à se soigner avec de bons taux de réussite.
Reste que je n’ai
même pas encore 35 ans, que ma fille n’a même pas un an, que j’ai un cancer et
que ça me fait chier (et aussi, évidement, peur).
Paradoxe de la
maladie
Comme me l’a expliqué
le docteur, le lymphome… Ben c’est comme ça, ca vous tombe dessus. Y a pas forcément
de raison ou d’antécédent qui le justifie. C’est bizarre, mais ce point me
rassure autant qu’il me préoccupe.
En fait c’est ça
qui m’a fait vous causer autant de néo-métal que de colère sans sujet j’autre
jour : c’est probablement aussi faux que malsain, mais si j’avais quelque
chose qui peut directement être associé à mon manque d’hygiène de vie des… 20
dernières années, au moins je pourrais me haïr, ou a défaut haïr ue image passée
de moi-même que je jugerai responsable de ce qui m’arrive.
De la même façon,
mon premier réflexe à l’annonce de la maladie avait été de soudain l’envisager
en mode « moi contre mon système lymphatique » sauf qu’en fait non ça
peut pas marcher comme ça.
Ma généraliste, à
qui j’avais partagé cette constatation, m’a offert l’image de « nous, c’est
vous ET votre système lymphatique contre le cancer », et si je… veux bien,
j’ai beaucoup de mal à gérer une anthorpomorphisation de la maladie qui m’atteint.
Paradoxe de la vision de l’avenir
En l’état actuel
je suis dans la phase d’investigation. Pour tout vous dire (on est entre gens
bien), je dois être opéré vendredi (biopsie) pour savoir une bonne fois pour
toute (espérons le) de quoi il en retourne. Ce qui m’attend derrière me
terrifie autant que m’impatiente. J’ai envie d’enfin passer dans une phase de
traitement, j’ai envie de pouvoir aller mieux, j’ai envie de sentir les plus
flagrants de mes symptômes disparaitre petit à petit (« de la chance dabs
mon malheur » : j’ai des symptômes tout cons genre des raideurs dans
le cou qui y sont directement associé et que j’ai sincèrement hâte de sentir
partir). Mais ça passe aussi par … Ben le traitement lui-même, dont les
conséquences me terrifient d’avance. Tel un Socrate moderne (et Dieu sait que
je honnis de me comparer au casse-couille en chef), tout ce que je sais c’est
que je ne sais rien. Je peux bien essayer d’appeler à moi le souvenir de mes
pires gueules de bois et angines cumulées, une part de moi sait que je suis
encore loin du compte. Enfin le point primordial c’est qu’à ce moment là, l’ensemble
m’offrira un peu de structure. Peut être que je redouterais à jamais un jour
donné de la semaine, mais ce sera différent de la période courante ou tout à la
fois je suis pas sur de ce que j’ai précisément, et suis à la merci de quand l’hôpital
m’appellera pour s’occuper de moi (par exemple : j’ai fais deux test COVI
en 3 jours parce qu’on m’a décalé ma chirurgie et que le test COVID doit être « frais »
de moins de 48 h.)
Credit where
credit is due: en deux semaines quasi toutes les étapes d’exploration auront
été faite, sachant que la biopsie se gère pas sur un coin de table non plus… J’ai
la chance d’être pris en main par des gens compétents et pour la plupart
sympathiques.
Les conséquences
se font déjà voir et elles sont positives
Je ne parle pas
du fait de perdre mes cheveux – je sais même pas encore si ça arrivera. Mais plutot d’une remise en question plus générale, un choc lié à a façon dont on se répond
soi- même à la question « si je mourais maintenant, est-ce que j’aurais au
moins l’impression d’avoir vécu ? » et bien sur… « Qu’est-ce que
je regrette ? »
A la vérité, je
peux d’ores et déjà vous dire que je regrette beaucoup de choses sur le plan
professionnel (qui est là où j'ai le moins l'impression d'avoir vécu). Mais je ne peux pas réécrire l’histoire et démissionner au bout
de deux ans de postes que j’ai occupé plus longtemps que ça, et puis de toutes
façons c’est probablement le dernier pan de ma vie sur lequel je vais pouvoir
agir – chronologiquement.
Non. On remet de
l’ordre tranquillement dans son jardin personnel, arrachant les regrets qu’on
peut telles des mauvaises herbes. Longtemps j’ai craint de ne pas trouver le
courage de redire à mon père que je l’aime (pour la première fois depuis mon
adolescence, peut-être). Longtemps j‘ai eu peur de ne lui dire que sur son lit
de mort à la rigueur. Et jamais il ne m’était venu à l’esprit que mon lit de mort
serait peut-être le premier. Eh bien quoiqu’il arrive cette crainte n’a plus
lieu d’exister. Comme quoi il ne sort pas que du mauvais des mauvais
évènements.
Aussi,
permettez-moi de vous le dire, à vous tous à qui j’ai envoyé le lien vers cet
article : je vous aime. On s’est peut-être pas causé sérieusement depuis
des piges, peut-être même que je vous dois encore 5 euros d’un coup qu’on a été
boire en 2010 j’en sais rien, mais peu importe : je veux que vous sachiez
tout à la fois que c’est la merde mais que je suis bien entouré. Et que, d’une
façon ou d’une autre, vous me manquez suffisamment pour que je sente le besoin
de vous informer.
Des bises à tous.
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